À la rédaction, une vague de départs et d'arrêts, symptôme d’une crise de confiance sans précédent

À la rédaction, une vague de départs et d'arrêts, symptôme d’une crise de confiance sans précédent


Depuis plusieurs mois, des signes montrent l’état de désarroi professionnel dans lequel est placée la rédaction de Sud Ouest, sans réaction notable de sa direction. La rédaction a enregistré depuis 2024 une dizaine de démissions ou licenciements pour inaptitude qui ont touché aussi l'encadrement. À cela s’ajoutent d’autres départs au sein de la rédaction, notamment via le plan de départs volontaires, où une vingtaine de personnes à la rédaction avait déposé un dossier. 11 journalistes – 7 titulaires et 4 pigistes – ont été retenus et sont donc partis, ou sur le départ.

Les journalistes proches de la retraite ne forment pas, loin de là, la majorité de ces départs. Il s’agit aussi de gens jeunes, et de femmes le plus souvent, ce qui pose au passage pas mal de questions sur la réalité des politiques d’égalité professionnelle mises en place au sein d’une entreprise désormais plus masculine que jamais. Et aussi, fait marquant, pas mal de salarié(e)s ayant des responsabilités managériales de divers niveaux.

Chacun a ses raisons de partir. Mais « Sud Ouest » n’a jamais, dans son histoire, connu pareille vague et il est bien difficile de n’y voir que des décisions individuelles indépendantes de la vie de l’entreprise, des perspectives qu’elle offre à ses salariés et du sens qu’ils peuvent donner à leur investissement. À ce titre, le sentiment partagé de courir sans but sur le pont du « Titanic » a forcément quelque chose à voir avec cette fuite des canots.
Autre conséquence directe de ces départs élevés, 9 postes de l'effectif de la rédaction se retrouvent, en cette rentrée de janvier post PDV, vacants de titulaires et occupés par des CDD, parce que nécessaires à l'activité.
Au-delà des départs, la direction devrait aussi s’intéresser aux arrêts de travail qui se multiplient ici et là, à ces journalistes, parfois à des postes d’encadrement, qui, visiblement, n’en peuvent plus de la charge ou du sens de leur travail, dilué dans des injonctions contradictoires. Apparemment, ils en ont parlé à leur médecin, qui a choisi de préserver leur santé. 

Dans ce contexte, les attentes et enjeux sont grands autour des nouvelles organisations de travail qui se mettent en place après ces coupes vives dans la rédaction, car ils reposent sur la confiance entre tous qu'il faut rebâtir dans certains services, sur une équité de traitement garantie par les managers, et sur une politique de ressources humaines à la rédaction, aujourd'hui accaparée par le directeur de la rédaction, Jean-Pierre Dorian, repensée et plus transparente.
 

Contradictions
Le PSE/PDV l’a acté en septembre, la rédaction de « Sud Ouest » a 22 postes de journalistes de moins à l’effectif dès ce début d’année (7 qui étaient occupés par des CDI, 11 par des CDD et 4 par des pigistes) et devra faire sans eux pour répondre aux objectifs fixés par la direction dans le budget 2025 : limiter la baisse des ventes du journal papier, engranger davantage d’audience pour augmenter les revenus de la publicité digitale et séduire toujours plus de nouveaux abonnés numériques, ces deux postes budgétaires étant les seuls qui augmentent dans le chiffre d’affaires prévisionnel de l’entreprise. Nous ne sommes plus à une contradiction près...
Pourtant, la rédaction est le cœur de l’entreprise, le cœur du réacteur, le moteur de la rentrée d’argent. Cela ne veut pas dire que seuls les journalistes travaillent, mais que tous les chiffres d’affaires d’un groupe de presse procèdent d’abord de ce que produit sa rédaction : les ventes, la publicité, l’événementiel, etc. Casser la rédaction revient à casser l’économie de toute la Sapeso. 

Le SNJ n’en revient pas d’être, une fois de plus, obligé de rappeler le simple bon sens : nous sommes avant tout un journal fait par des journalistes. L’actionnariat et la direction générale ne sont visiblement pas au courant ; en tout cas, leurs actes semblent agir en dépit de cette évidence.
Alors le directeur général, Nicolas Sterckx, formulera bientôt des « hauts les cœurs » dérisoires en guise de bons vœux à la rédaction. Des vœux pieux, après en avoir réduit les moyens dans d'aberrantes proportions. La direction n’estime pas plus ses journalistes en 2025 qu’en 2024, elle est simplement en train de comprendre la bêtise qu’elle a faite et panique. Elle appelle les journalistes à l’aide, à colmater encore et toujours.

Le SNJ est plus sérieux que cela. Malgré les décideurs inconséquents, il estime plus que jamais nécessaire de relancer les ateliers pour « Une nouvelle ambition éditoriale ». Mais cela ne suffira pas à redonner de l’élan à une rédaction qui ressemble aujourd’hui, en dépit du bon sens, en dépit de tout, à la dernière roue de la charrette. En 2025, la méthode Coué utilisée jusqu’ici par Nicolas Sterckx ne suffira plus à redonner de l’espoir aux journalistes et un cap à l’entreprise.

Bordeaux
Vendredi 10 janvier 2025
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