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Communiqués de presse

[SNJ - SNJ-CGT - CFDT-Journalistes]

La liberté de la presse en Turquie ne peut pas être bradée !


Appel au Président de la République, M. François Hollande.



Monsieur le Président,

Dans un article publié par le quotidien Le Monde daté du 17 mars, Can Dündar, rédacteur en chef du journal turc d’opposition Cumhuriyet, s’en prend aux leaders européens qu’il accuse d’« abandonner les démocrates en Turquie », donc notamment les journalistes, en raison des négociations et accords intervenus entre Bruxelles et Ankara sur la crise des migrants.

Can Dündar et son confrère Erdem Gül (responsable du bureau d’Ankara du journal) seront appelés à comparaître le 25 mars devant un tribunal d’Istanbul accusés d’ « espionnage » et de « divulgation de secrets d’Etat ». Ils risquent la réclusion à vie pour avoir fait simplement leur travail de journaliste, celui d’informer l’opinion publique.

Arrêtés en novembre et détenus pendant trois mois dans les geôles de la prison de Silivri sans avoir été déférés devant un juge, ils ont été finalement libérés par une décision de la Cour Constitutionnelle « au motif que nous n’avions rien fait d’autre que du journalisme », souligne le journaliste. Can Dündar se souvient des propos du Premier ministre turc à propos de la liberté de la presse : « Pendant que Davutoglu (le premier ministre) déclarait qu’en Turquie, "aucun journaliste n’est en prison à cause de ses activités de journaliste", j’étais devant la télévision de la prison où je me retrouvais pour avoir publié une information sur la livraison d’armes en Syrie par les services de renseignements turcs. Et, dans l’isolement cellulaire où j’étais maintenu, je m’écriais: « Quel énorme mensonge ! »

D’ailleurs, poursuit Can Dündar : « en Turquie, les journalistes étaient libres de poser les questions, à la condition d’accepter le risque de perdre leur emploi ou d’aller en prison. Cette situation avait fait de la Turquie l’une des plus grandes prisons pour journalistes du monde ».

Au-delà, le rédacteur en chef du Cumhuryiet fait un constat amer de la position des Européens face à la situation de son pays où le régime islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan met à mal la laïcité, les libertés, les droits du peuple kurde visé par une répression sanglante. « L’Occident sacrifie ses principes historiques au profit de ses intérêts quotidiens et perd ainsi, en raison de ce double jeu, tous ses alliés naturels. En disant: « Gardez loin de nous les réfugiés et faites ce que vous voulez chez vous », l’Europe loue un camp de concentration à l’extérieur de ses frontières et ferme les yeux sur l’oppression exercée par le gardien volontaire de ce camp. Ce n’est pas seulement une honte pour l’Occident, c’est aussi une honte pour l’humanité », souligne notre confrère.

Can Dündar conclut en lançant un appel que nous ne pouvons que partager : « Cette lutte n’est pas une lutte entre l’Occident et l’Orient, ce n’est pas une lutte entre l’Europe et la Turquie, c’est la lutte entre ceux qui croient, en Occident comme en Orient, à la liberté de la presse, aux droits de l’Homme, à la démocratie, et ceux qui piétinent ces valeurs. Si les premiers sont vaincus, les perdants ne seront pas seulement les démocrates de Turquie, mais l’ensemble des valeurs universelles que sont la laïcité, l’égalité entre les hommes et les femmes, la liberté de pensée, l’indépendance de la justice ».

M. Le Président, les syndicats de journalistes français (SNJ, SNJ-CGT, CFDT journalistes, membres de la Fédération internationale des Journalistes et de ses 600.000 adhérents dans le monde) vous demandent instamment de faire en sorte que la France pèse de tout son poids afin que la Turquie ne soit plus « une des plus grandes prisons » pour nos confrères. Ce pays compte en effet aujourd’hui une trentaine de nos journalistes embastillés.

Nous demandons avec la plus grande détermination que le procès de Can Dündar et Erdem Gül soit annulé, car sans base légale d’après le syndicat turc des journalistes (TGS). Ce procès, comme l’enfermement de journalistes, mais aussi l’affaire de Zaman – prise en otage du plus grand tirage en Turquie pour transformer ce quotidien en organe pro gouvernemental – et tant d’actes de censure témoignent des atteintes graves à la liberté de la presse, au pluralisme dans un pays candidat à l’Union européenne.

Des entraves gravissimes à la Charte européenne pour la liberté de la presse que l’Europe, et en premier lieu la France, ne peuvent garder sous silence.

Veuillez croire, Monsieur le Président, en nos sentiments respectueux.


SNJ, SNJ-CGT et CFDT Journalistes


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Paris, le 22 Mars 2016

Thèmes : Liberté

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